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Mon blog professionnel, à l'attention des dirigeants d'entreprises, fait un point régulier sur les questions de management, gestion des crises. Il suit de près l'actualité sociale, les risques psychosociaux et les négociations en cours

Accompagner la peur et l'angoisse

 

Ch. André Psycho de la peurChristophe André

 

Psychologie de la peur

Craintes, angoisses et phobies


Odile Jacob, Paris, novembre 2005, 368 p.

 

La peur est une émotion fondamentale, c’est-à-dire universelle, inévitable et nécessaire, puisque sa fonction consiste à nous protéger du danger… Sauf si une peur non régulée, que l’on nomme « attaque de panique » vient annihiler les capacités d’action ou de réaction du sujet. C’est à ce thème venu sur le devant de la scène psy que Christophe André, médecin psychiatre à l’hôpital Sainte-Anne de Paris (il y dirige une unité spécialisée dans le traitement des troubles anxieux et phobiques) a consacré cet ouvrage à la fois fouillé et grouillant d’exemples troublants.

 

Un phénomène souvent au travail chez ces patients consiste en ce qu’ils souffrent essentiellement d’une « peur de leur peur ». Et que personne ne vienne repousser l’assertion d’un revers de la main ! Environ un adulte sur deux est sujet à une peur excessive, activée par telle ou telle situation : le vide, l’enfermement, certains animaux, le sang, le regard des autres… La plupart du temps, les personnes concernées déploient des stratégies d’évitement destinées à ne pas se confronter à ces menaces. Cependant, à mesure que se renforce leur peur, celles-ci deviennent très invalidantes.

 

Heureusement, les thérapies comportementales et cognitives permettent désormais d’apprivoiser ces manifestations avec succès et dans un temps relativement limité. On sait, en effet, que le siège de nos réactions émotionnelles se situe dans la partie la plus archaïque de notre cerveau, le cerveau limbique. C’est d’ailleurs pourquoi, comme toutes les émotions, le déclenchement de la peur échappe à notre volonté. Mais, une fois l’alerte donnée, c’est notre néocortex qui décode et régule les émotions. Il peut les bien réguler ou, au contraire, se mettre à dysfonctionner jusqu’à l’anxiété – qui est une peur anticipée – ou encore, dans les cas plus graves, jusqu’à la panique et la terreur. Alors se produit une perte de contrôle sur la peur. C’est ici qu’interviennent les thérapies comportementales qui familiarisent progressivement le sujet avec la source de ses craintes pour en diminuer les effets invalidants.   

 

Apprentissage de la peur

Il semble que quatre grands types « d’apprentissages » puissent faciliter cet apprivoisement :

 

- les événements traumatisants,

- les événements de vie pénibles et répétés, comme des humiliations, des manifestations d’insécurité, 

la transmission par modèles, souvent par la voie parentale,

- l’intégration de messages de mise en garde insistant, en particulier au cours de son éducation.

 

À partir de là, le sujet peut devenir vulnérable à des « attaques de panique ». Celles-ci se trouvent caractérisées par la submersion émotionnelle (il ressent son corps comme une oppression), une attitude psychologique qui regarde exclusivement le monde à travers le prisme du danger et un comportement entièrement mobilisé par la surveillance et la préparation à la fuite. « La peur a de grands yeux », dit un proverbe russe.

 

Face aux processus pré-attentionnels qui ne dépendent pas de la personne, il est difficile d’agir. En revanche, les comportementalistes, par la confrontation progressive avec les situations perçues comme menaçantes, permettent à l’hippocampe et au cortex préfrontal de mieux jouer leur rôle de filtre des alertes lancées par l’amygdale cérébrale. Ainsi, de la même manière que le sujet a « appris sa peur », il apprend à la maîtriser.

 

Christophe André raconte ainsi de multiples situations cocasses à travers lesquelles il lui est possible d’aider ses patients : attitudes incongrues dans le métro, confrontation avec des araignées… Bien sûr, ces thérapies obéissent à des protocoles contrôlés, extrêmement progressifs et répétés, sous peine de risquer l’effet inverse de celui qui est recherché. Avec parfois l’aide d’antidépresseurs dont l’action consiste à augmenter le taux de sérotonine, donc la neurotransmission cérébrale.

 

Exposition à la peur

Ces techniques comportementales ont été inaugurées par Mary Jones, une thérapeute américaine, dès 1924. Le petit Peter, âgé de trois ans, avait développé une phobie des lapins, des rats et des grenouilles. Mary Jones décida de le traiter par deux techniques conjointes : le déconditionnement par habituation progressive et l’imitation des modèles. Durant les séances, l’enfant était installé sur une chaise haute et s’occupait à des activités agréables, comme jouer ou manger ses aliments préférés, tandis qu’un lapin était amené dans une cage. D’abord à l’autre bout de la pièce, puis progressivement plus près. Au bout d’une quarantaine de séances, l’enfant pouvait jouer affectueusement avec le lapin et sa crainte des autres petits animaux avait disparu et ces effets furent durables.

 

Parmi les méthodes d’exposition auxquelles recourent Christophe André et son équipe, les plus classiques concernent des expositions situationnelles, sur le modèle de celle de Mary Jones. Ils utilisent également des expositions intéroceptives basées sur le déclenchement de sensations liées à un réflexe de peur (vertiges, par exemple). D’autres fois, ils font appel à l’imagination des sujets, voire à des expositions par imagerie virtuelle, lorsque les méthodes in vivo sont impossibles.

 

Il est également possible de traiter avec succès les phobies sociales, souvent considérées comme les plus invalidantes et les troubles paniques avec agoraphobie.

 

Les peurs et phobies sociales

Les situations sociales provoquant des peurs et phobies se trouvent reliées au regard et à l’évaluation d’autrui. De nombreuses personnes souffrant de peurs sociales « sont fortement marquées par la honte », observe Christophe André. Or, les éthologues ont montré que ces émotions prennent racine dans les rapports de dominance et d’acceptance au sein des groupes animaux. Se joue là une question de statut.

 

Dans ces situations, le sujet est focalisé sur soi au détriment de l’interaction avec les autres et c’est ce que lui apprennent à contrôler les thérapies comportementales et cognitives, avant de développer un travail sur ses pensées et l’acceptation de soi.

 

Voilà une somme d’expériences et de réflexions qui seront très utiles au coach, qui croise sur son chemin nombre de problématiques en relation avec les peurs sociales et leurs effets invalidants.

 

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