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Mon blog professionnel, à l'attention des dirigeants d'entreprises, fait un point régulier sur les questions de management, gestion des crises. Il suit de près l'actualité sociale, les risques psychosociaux et les négociations en cours

Il faut penser la charge de travail, vite

Atlas-201L'article qui suit est dû à Chantal Matima Sergent, Le cercle des Échos

 

La charge de travail pourrait bien constituer le grand chantier des prochaines années en matière de risques psychosociaux. De nombreuses études démontrent les effets des réorganisations sur la charge de travail des salariés et, dans nombre de diagnostics internes, elle apparaît comme un facteur de risque élevé. Parallèlement à ce constat, les interventions récentes du législateur et la judiciarisation progressive des questions relatives à la "charge de travail" représentent des signaux d’alerte qui doivent inciter tout DRH, manager ou CHSCT à débatte de cette problématique en conservant à l’esprit la volonté de concilier des enjeux à priori contradictoires. 


Managers en situation d’équilibristes 

Si on se place sous l’angle de la direction, au sens large, l’enjeu réside dans une allocation optimale des ressources : il faut réduire ou, pour le moins, mettre sous contrôle les coûts. Dès lors, en fonction du volume d’activité, il faudra  trouver l’équilibre entre les effectifs et le volume d’activité dans un intervalle de temps précis. Lors d’une réorganisation, d’un plan social ou de l’introduction de changements, la charge de travail est alors souvent déterminée par une méthode strictement quantitative.

À l’inverse, du point de vue du salarié, la charge de travail met en cause le vécu subjectif du travail. Elle peut être perçue souvent comme trop importante "je suis débordé" ou, parfois, comme insuffisante "je n’ai pas grand-chose à faire". Dans tous les cas, lorsque les conditions de travail se dégradent, la charge de travail pèse sur la santé mentale. Les CHSCT et les médecins du travail ne manquent pas de remonter cette question épineuse.

Au milieu de cette vision duale, les managers  ont la lourde tâche de décliner auprès des équipes, des objectifs fixés dans des contextes contraints de raréfaction des moyens et des ressources. Pour eux, la charge de travail devient un exercice d’équilibriste entre objectifs/ressources/moyens.

Les enjeux diffèrent, mais faut-il pour autant faire comme s’ils étaient inconciliables ? Faut-il attendre l’intervention du droit ou d’un tribunal de grande instance pour agir sur la charge de travail ? Rappelons qu’en décembre 2012, le TGI de Créteil a fait suspendre le plan "Organisation 2012" de la FNAC au motif, notamment, d’une analyse insuffisante du report de la charge de travail sur les postes conservés. En juin 2011, les conclusions du TGI de Versailles à l’encontre de Renault mettaient également en évidence l’absence de mesures prises par l’entreprise pour évaluer la charge de travail d’un de ses salariés.

Considérer la complexité des faits

La charge de travail n’est pas un sujet nouveau en soi. Le modèle d’organisation scientifique du travail, à partir duquel se sont construites la plupart des organisations ou institutions et dont procèdent, de près ou de loin, les nouvelles formes d’organisation du travail), a toujours placé la question de la mesure, du contenu et de la répartition de la charge de travail au centre de ses préoccupations. Le foisonnement des définitions et des études met en relief deux points essentiels. D’une part, la polysémie de la charge de travail, d’autre part, la nécessité d’intégrer, dans toute réflexion sur la charge de travail, quatre faits indéniables qu’il est bon de rappeler.

Premièrement, depuis Taylor le travail a évolué et à coup sûr, le travail continuera d’évoluer. Deuxièmement, le travail revêt une dimension prescrite (les procédures, les objectifs, les règles parfois orales, etc.) et une dimension réelle (ce que fait véritablement le salarié au quotidien compte tenu des conditions, de l’organisation du travail, des liens sociaux tissés au sein du collectif de travail, etc.). Troisièmement, le travail s’exprime à travers un vécu subjectif des salariés. Ce vécu témoigne, en quelque sorte, de l’écart entre le travail réel et le travail prescrit. Enfin, le travail est un levier de développement, de fierté et de reconnaissance des salariés.

Accepter ces faits, c’est déjà faire évoluer les regards et commencer à semer les bonnes graines.

Manager, voilà une idée responsable

C’est pourquoi, pour faire évoluer les regards et agir sur la charge de travail, il est nécessaire de faire tomber les positions duales et de considérer le travail comme un outil de management, au même titre que gestion financière, le marketing ou la gestion des ressources humaines.

Il va donc bien falloir manager le travail. Un défi quand on sait combien la compréhension du travail est quasiment exclue des parcours de formation des managers, des décideurs et des jeunes diplômés en passe de conquérir les responsabilités.

Il conviendrait alors de procéder avec méthode, soit :

 > Se mettre d’abord d’accord sur la terminologie de "charge de travail", en clarifier les enjeux et les contours par population et métier ainsi que dans tout projet de transformation.

> Distinguer clairement mesure et évaluation de la charge de travail pour trouver l’équilibre entre deux approches, l'une quantitative par le biais du comptage, l'autre qualitative, au moyen d’une analyse des facteurs pesant sur la charge de travail.

 > Réfléchir à un dispositif d’évaluation et de suivi de la charge de travail, économiquement viable et socialement responsable.

Après le harcèlement moral de la fin des années 90, puis la pression du législateur pour aboutir à des plans d’action ou négocier des accords de prévention des risques psychosociaux à la fin de la première décennie, la charge de travail pourrait bien représenter le prochain grand chantier à ouvrir dans le cadre d’une démarche de Qualité de Vie au Travail. L’obligation du contrôle de la charge de travail des salariés dans les entreprises recourant au forfait jour par exemple (arrêt n°11-14540 du 26 septembre 2012 de la Cour de cassation), la multiplication et l’intensité des réorganisations, les changements de paradigmes socio-économiques que vivent nos sociétés modernes nécessitent d’agir dès à présent sur ce thème si l’on entend éviter qu’il devienne la bombe à retardement dont on perçoit déjà le tic-tac.

 

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C
Nous sommes tous impliqués dans de plus en plus de projets ou missions avec différentes personnes.<br /> <br /> Il est donc difficile pour les gens qui nous entourent, voire qui nous managent, d'avoir une vision suffisante de ce que nous faisons... à moins d'y passer la moitié de son temps... et c'est un<br /> problème.<br /> <br /> C'est pourquoi des outils de travail collaboratifs d'un nouveau type émergent comme http://www.azendoo.com pour donner une vision partagée du travail qui est fait, et arriver à organiser<br /> collectivement le travail.
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