Mon blog professionnel, à l'attention des dirigeants d'entreprises, fait un point régulier sur les questions de management, gestion des crises. Il suit de près l'actualité sociale, les risques psychosociaux et les négociations en cours
La crise n’a pas de frontières. Cantonnée dans un premier temps aux pays riches (Etats-Unis et Europe en tête), elle s’est rapidement répandue tel un virus aux pays en développement. Dominant les débats au début du séisme financier, l’hypothèse d’un « découplage » entre économies du Nord et du Sud n’est désormais plus d’actualité. Cela n’a d’ailleurs rien d’étonnant : les vagues successives de libéralisation financière et commerciale liées au processus de globalisation ont rendu les économies en développement fortement vulnérables aux chocs externes.
Certes, la crise ne frappe pas également l’ensemble des pays en voie de développement. Ceux qui disposent d’excédents commerciaux élevés grâce à leurs exportations, sont mieux à même d'affronter la récession. C’est surtout le cas des économies émergentes telles que la Chine, l’Inde, le Brésil ou encore l’Indonésie. En revanche, dans les pays à faible revenu, la pilule de la crise est nettement plus amère. Notamment en Afrique sub-saharienne.
Néanmoins, si elle les affecte de façon différenciée, la crise emprunte des canaux similaires pour s’étendre aux pays en développement. La première courroie de transmission réside dans l’effondrement des échanges commerciaux qui a provoqué l'effondrement de leur consommation et une chute des revenus d’exportation. Le deuxième canal de propagation de la crise vers les pays en voie de développement concerne le tarissement des flux financiers. Après avoir atteint un niveau record de 1029 milliards de dollars en 2007, les entrées de capitaux privés devraient en effet tomber à 363 milliards de dollars en 2009. En cause : la décision des investisseurs étrangers de revendre une partie de leurs actifs pour éponger leurs pertes gigantesques liées à la crise des subprimes.
La crise est-elle vraiment passée ?
L’année 2009 a donc été particulièrement difficile pour les pays en voie de développement. En annonçant les prémices d’une reprise dès 2010, les organisations internationales se veulent néanmoins rassurantes. Ainsi, le Fonds monétaire international (FMI ) prévoit une croissance de l’économie mondiale de 3,1% en 2010, après un recul de 1,1% du PIB mondial en 2009.
Pourtant, la perspective d’un rebond économique doit être sérieusement mise en question pour trois raisons principales. Tout d’abord, sur le plan bancaire, malgré des profits substantiels enregistrés ces derniers mois, les banques regorgent encore de produits toxiques qui plombent leurs bilans et rendent incertain la reprise du crédit : elles n’ont comptabilisé pour l’instant que 40% des pertes qu’elles devront finir par prendre en compte. Deuxièmement, sur le plan commercial, bien que la Chine et l’Asie émergente enregistrent actuellement une reprise, leur poids économique n’est pas suffisant pour tirer seul l’économie mondiale.
En outre, il y a lieu de s’interroger sur la capacité des pays riches – plombés par l’endettement – à absorber les exportations asiatiques avec autant d’entrain qu’avant la crise. Enfin, même si la reprise devait s’installer en 2010, elle finirait par déboucher tôt ou tard sur de nouvelles crises systémiques. Car, en l’absence de mesure ambitieuse pour re-réguler les marchés financiers, rien n’empêche aujourd’hui les banques de s’engager dans les mêmes opérations risquées qui ont conduit à la crise actuelle. Il semble d’ailleurs que les injections massives de milliards de dollars effectuées par les Etats et les banques centrales pour sauver le secteur financier aient déjà conduit à l’émergence de nouvelles bulles spéculatives.
Pour 2010 : des réformes sinon rien
Reprise ou pas, le système financier ne peut pas se passer d’une refonte en profondeur, au risque de s’effondrer encore plus violemment. Les mesures entérinées par les leaders du G20 sont cependant bien trop timides pour garantir une sortie de crise écologiquement soutenable et socialement équitable. En outre, les pays les plus pauvres ont à nouveau été largement oubliés par les leaders mondiaux. Ils sont pourtant les premières victimes d’une crise dont ils ne sont pas à l’origine.
Pour leur assurer les moyens de sortir de la récession et de financer leur développement, les cinq champs d’action suivants devraient être envisagés à court et moyen terme :
> Augmenter l’aide non créatrice de dettes, ce qui implique que les pays donateurs maintiennent leur engagement de consacrer 0,7% de leur RNB d’ici 2015 à l’aide publique au développement ;
> Annuler la dette des pays en développement ;
> Instaurer une taxe sur les transactions financières pour financer le développement ;
> Enrayer la spéculation sur les marchés agricoles ;