Mon blog professionnel, à l'attention des dirigeants d'entreprises, fait un point régulier sur les questions de management, gestion des crises. Il suit de près l'actualité sociale, les risques psychosociaux et les négociations en cours
Si je fais un bilan des études et plan d'actions que j'ai conduits depuis le début de l'année en matière de risques psychosociaux, je constate - comme l'ensemble de la profession - que les entreprises ont désormais compris les nécessités découlant de l'article L.4121-1 modifié du code du travail. Qu'elles aient lancé une démarche ou qu'elles attendent, pour des raisons d'opportunité interne, l'épée de Damoclès de la responsabilité pénale suspendue au-dessus des problématiques psychosociales fait son effet. Avec la question des suicides comme menace ultime.
Pourtant, c'est rarement à l'initiative exclusive des directions que ces démarches sont engagées. Il y faut souvent l'élément déclencheur de difficultés réitérées, relevées par les IRP ou les CHSCT, voire le dépôt d'un droit d'alerte pour que se mette réellement en marche une analyse commune. C'est pourquoi, il est hasardeux pour l'entreprise de se lancer seule, sans le regard d'un tiers extérieur dégagé des tensions internes.
D'ailleurs, la principale difficulté sur laquelle nous butons se rapporte au fait que les questions psychosociales coagulent l'ensemble des tensions accumulées entre Directions et Syndicats. La méfiance est fréquemment grande entre les acteurs. Pourtant, plus nos expériences s'enrichissent et plus se renforce ma conviction que ces questions doivent être traitées en dépassant les habituels enjeux sociaux, de façon à obtenir une mobilisation réelle de tous les acteurs de l'entreprise.
Car, passé l'enquête sur laquelle généralement les analyses convergent même si les mots souvent diffèrent, il faut ensuite passer à l'acte. Transformer ces analyses en plans d'actions partagées entre IRP - Direction - Conseils externes et s'accorder sur les priorités représente un réel défi. Mais, plus encore, c'est la mise en place de dispositifs réellement opératoires sur le terrain qui constitue l'étape la plus complexe à conduire. Car, si les acteurs de l'entreprise ont un avis (souvent élaboré) sur les facteurs de risques psychosociaux, ils se trouvent démunis pour faire émerger les leviers les plus efficaces pour traiter les enjeux essentiels.
Aider à choisir les mesures d'un plan d'action lisible par tous et réellement porteur de mieux être au travail représente, généralement, la part la plus subtile d'une démarche de prévention des RPS. C'est là que l'expérience stratégique, l'habitude des relations sociales et de la communication prennent le pas sur la qualité d'écoute et l'attention à l'autre pour que l'action puisse légitimement être regardée comme réussie, une douzaine de mois environ après qu'elle ait été lancée.
Vous l'avez compris, je ne partage pas l'avis qu'il faudrait distinguer le diagnostic (partie supposée "scientifiquement pure") de l'élaboration et la mise en oeuvre d'un plan d'action (aux relents de cambouis). Car, notre mission consiste bien à améliorer la vie au travail des salariés en respectant les équilibres sociaux et les enjeux principaux de l'entreprise qu'il ne nous appartient évidemment pas de bousculer, plus que nécessaire, dans le cadre de nos interventions.