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25 août 2013 7 25 /08 /août /2013 16:25

La Voie 

 

Edgar Morin

La voie – Pour l’avenir de humanité

Fayard, 2011.

 

 

Le Bouddhisme, le zen, les philosophies orientales sont à la mode. Edgar Morin n’y échappe pas en intitulant son ouvrage « la Voie » et en le plaçant sous la lumière du proverbe zen, « la grande Voie n’a pas de porte. Des milliers de routes y débouchent ». Mais, le plus intéressant dans ce texte tient dans la reprise que fait de son approche systémique. Une occasion pour nous de renouveler la promenade à travers ce qu’il nomme la pensée complexe.

 

À titre de prolégomènes, il faut constater la difficulté qui existe à penser le présent, d’autant que les processus en cours sont accélérés et que nous nous trouvons face à leur mondialisation laquelle, tout en s’étendant à l’intégralité de la planète ou peu s’en faut, induit d’innombrables inter-rétro-actions entre de nombreuses dimensions (économiques, sociales, démographiques, politiques, idéologiques, religieuses…). Parallèlement, nous devons considérer nos carences cognitives liées, notamment, à la désintégration-spécialisation de la connaissance et aux limites du l’occidentalo-centrisme. Ces carences ne nous permettent pas d’embrasser convenablement la crise complexe à laquelle le monde est confronté : désintégration des empires, crise écologique, démographique, crises des croyances et crises du progrès et du développement.

 

Vers l’abîme ou la métamorphose ?

 

Certains peuvent en déduire que nous courons vers l’abîme. D’autres, comme Morin, tentent de trouver, à travers un certain nombre de signaux faibles et malgré les risques existants, les voies et moyens d’un rebond de l’humanité. Car, « quand un système est incapable de traiter ses problèmes vitaux, il se dégrade, se désintègre ou alors il est capable de susciter un méta-système » apte à le métamorphoser. Or, il existe déjà, sur tous les continents, un bouillonnement créatif, une multitude d’initiatives locales, allant dans le sens de la régénération dans tous les domaines évoqués. Toutefois, elles demeurent dispersées et s’ignorent les unes les autres quand il faudrait les recenser pour ensuite les relier et les stimuler.

 

En lieu de quoi, notre mode de connaissance nous limite à des oppositions binaires : mondialisation / démondialisation, croissance / décroissance… S'il faut que se constitue la conscience de notre communauté de destin (la « terre-patrie », pour reprendre l’expression de Morin), il faut aussi promouvoir simultanément le global et le local à travers, l'alimentation de proximité, les artisanats locaux, les commerces de proximité, le maraîchage périurbain, les communautés locales et régionales. Du même coup, le monde humain doit évoluer en spirale, retourner partiellement au passé pour repartir vers le futur.

 

L'orientation croissance/décroissance signifie qu'il faut faire croître les services, les énergies vertes, les transports publics, l'économie sociale et solidaire, les aménagements d'humanisation des mégapoles, les agricultures et élevages fermiers et biologiques, mais décroître les intoxications consommatoires, la nourriture industrialisée, la production d'objets jetables et non réparables, le trafic automobile, etc.

 

Les raisons d’espérer

 

À regarder le monde aller, Edgar Morin aperçoit cinq raisons d’espérer :

 

1 – le surgissement de l’inattendu et l’apparition de l’improbable qui nous ferait brusquement changer de paradigme ;

2 – les capacités auto-régénératrices de l’humanité ;

3 – les vertus de la crise susceptibles de pousser le système jusqu’à sa déstabilisation libératrice ;

4 – le fait « la où croît le péril, croît aussi ce qui sauve » ;

5 – l’aspiration multimillénaire à l’harmonie qui pourra rejoindre la Voie vers la métamorphose.

 

On le constate, une compréhension systémique du fonctionnement de notre époque, ajoutée à un certain optimisme fondé sur les capacités de régénération, présentes dans l’homme et la société, permettent à l’auteur d’envisager une approche conceptuelle convaincante et porteuse d’espoir. À l’évidence, les solutions concrètes qu’il s’impose d’esquisser peuvent laisser plus sceptique.

 

Les voies de la Voie

 

Reprenant diverses propositions formulées dans des ouvrages antérieurs, il appelle de ses vœux, pour commencer, une réforme politique qu’il nomme la « politique de civilisation » (dont N. Sarkozy avait occasionnellement repris la formule mais pas les orientations). Celle-ci commencerait par une « politique de l’humanité », fondé sur le caractère indissoluble de l’unité et de la diversité humaine, conjuguant une réforme de l’ONU, une politique de soutenabilité et un meilleur partage du développement.

 

Elle se prolongerait, en matière économique, par un « conseil de sécurité économique » assurant la régulation planétaire des mouvements financiers et le développement d’une économie plurielle. S’y ajouteraient des réformes sociales allant de la dé-bureaucratisation à la lutte contre la misère au niveau mondial associées à un renforcement des instances locales.

 

En termes de pensée, une réforme s’impose fondée sur la reliance des connaissances aujourd’hui éparses, associée à une réforme de l’éducation. Enfin, une « réforme de la vie » est souhaitée fondée, notamment, sur la réduction de l’urgence et du mouvement de « prosaïsation » de la vie. Le tout serait couronné par une réforme morale appuyée sur la réduction des égoïsmes, le civisme et une « éthique du genre humain ».

 

La nécessaire approche stratégique du changement 

 

Il est clair que, si certaines orientations sont souhaitables, dans le passage de la pensée à l’action, Edgar Morin reproduit la difficulté traditionnelle du « prince-philosophe ». Notamment parce que, contrairement aux fondements mêmes de sa théorie, il abandonne la pensée systémique pour retrouver une approche causale dès lors qu’il s’agit de songer aux mises en œuvre possibles. Il néglige également la dimension stratégique qu’il conviendrait d’introduire dans une philosophie systémique de l’action, tant il est vrai que toute évolution ne suit pas un cours régulier non plus que, même réussie, elle n’atteint jamais son objectif optimal et s’installe dans des solutions sous-optimales mais acceptables que les anglo-saxons nomment le satisficing.

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Présentation

  • : Le blog de Patrick Lamarque
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L'animation ci-dessous présente ma pratique du coaching individuel et d'équipe à destination des dirigeants. En cliquant sur l'image en bas à droite (petite croix) vous pourrez l'ouvrir en mode plein écran et, ainsi, la lire plus confortablement.

 


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Patrick Lamarque est conseil de dirigeants en stratégie, gestion des crises et management du changement. Il est également coach pour dirigeant privés et publics et expert en prévention des risques psychosociaux. Il opère en France et à l’étranger.


Ancien élève à l'Ecole Nationale d’Administration, Patrick Lamarque, dans les années 80, a créé la mission communication interne et maîtrise du climat social à la Ville de Paris, coordonné la communication gouvernementale auprès du Premier ministre et conseillé pour sa communication le ministre de la Défense. Dans les années 90, il dirige la communication de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Bordeaux, puis celle de la Ville et de la Communauté Urbaine de Lyon. Il est ensuite appelé comme Conseiller auprès du Secrétaire d'État à la Défense, puis auprès de la Secrétaire d’Etat aux Personnes handicapées avant d’être chargé de la concertation et de l’accompagnement social à la Délégation Générale pour l’Armement.


Introducteur des études qualitatives dans l’analyse politique il a développé ces méthodes pour structurer une démarche globale de maîtrise du climat interne de l’entreprise. Il a développé une approche novatrice d’entretiens de confrontation pour la résolution de conflits.


À partir de son expérience dans la gestion de la communication de la Défense durant la première guerre du Golfe, il a créé une méthodologie de maîtrise des crises qui a fait ses preuves dans de multiples situations difficiles, lors de crises de changement, de situations d’urgence psychosociale ou de plans de sauvegarde de l’emploi.


Il a enseigné à l’ENA, au CELSA, à l’EFAP, dans plusieurs universités françaises ainsi qu’à l’École Supérieur du Commerce et des Affaires de Casablanca et à l’Université de Buenos-Aires. Il est l'auteur d’une vingtaine d’ouvrages.

 

 

 

Le jardin haïku

 

Quelques beaux poêmes

 

Dans une vieille mare,

une grenouille saute,

le bruit de l'eau.

Bashö (1644-1694)

 

 

Porté par l'obscurité.

Je croise une grande ombre

dans une paire d'yeux.

Tomas Transtromer (Prix Nobel 2011), traduit par Jacques Outin


 

Sur la plage

je regarde en arrière

pas la moindre trace de pas.

Hosai  (1885-1926)

 

 

J'étais là moi aussi -

et sur un mur blanchi à la chaux

se rassemblent les mouches.

Tomas Transtromer (Prix Nobel 2011), traduit par Jacques Outin

 

 

Il n'y a rien

dans mes poches -

rien que mes mains.

Kenshin (1961-1987)

 

 

Un papillon blanc sort
D'entre les rayures d'un zèbre.

Sei Imai

 

 

Plus que de l'aveugle
Du muet fait le malheur

La vue de la lune.

Kyoraï

 

 

Au coucou

Elle ne répond rien

La girouette en fer.

Seiho Awano

 

 

Un papillon
vole au milieu
de la guerre froide
Nakamura Kusatao
 

 

 

Le printemps passe.

Les oiseaux crient

Les yeux des poissons portent des larmes.

Bashö (1644-1694)

 

 

Plutôt  que les fleurs de cerisier

Les petits pâtés !

Retour des oies sauvages.

Matsunaga Teitoku (1571-1654)

 

 

Que n'ai-je un pinceau
Qui puisse peindre les fleurs du prunier
Avec leur parfum!
Shoha
 

 


 

Quelques essais personnels

 

Le bolet doré

au couteau de l'automne

craque mollement.

P.L.

 

 

La nuit est posée

l’hiver gagne la ville –

Frisson de moineau. 

P.L.


 

Un mille-pattes trébuche

-bruit de catastrophe-

entre quelques brins d'herbe.

P.L.


 

Cul grisâtre 

d'une bouteille lancée

dans la mer étroite -

bonjour Trieste.

P.L.

 

 

Goutte à goutte

- loupes hallucinées -

le toit s'égoutte.

P.L.

 

 

Au profond de la nuit

rentrent les meurtriers

le devoir accompli.

P.L.

 

 

Tendu comme un arc,

l'hiver scarifie

d'une autre ride le visage.

P.L.

 

 

Dans la nuit luisante

résonnent des pas

- un chien lève la patte -

P.L.

 

 

Inconsciente,

la rue se rue

vers sa fin.

P.L.

 

 

Au bal de la nuit

aux phalènes,

le pied glisse

sur les cadavres joyeux.

P.L.

 

 

La brume

nappe le relief

du jardin myope.

PL

 

 

Le rictus du caïman

remonte à l'oeil qui pétille.

Sa proie lui sourit.

PL

 

 

Le lacet défait

flâne près du soulier -

Le nez au vent.

PL

 

 

Elle a renversé son sac

à la recherche de ses clés -

Sourire amusé.

PL

 

 

Elle s'est jetée dans l'étang -

La lune abîmée

de désespoir.

PL

 

 

Où va la nuit dans le noir

quand je me retiens

de bouger et de vouloir?

PL

 

 

Le temps de la cigale

stridule sans fin,

puis tombe la nuit.

PL

 

 

Les bras écartés

il surgit de la neige

l'épouvantail brun.

PL

 

 

Aux oiseaux inquiets

l'épouvantail tend les bras -

Je crais pour ma vie.

PL

 

 

Le crabe rougit

découvrant la baigneuse -

L'eau s'est troublée.

PL

 

Le coin des livres


Réalité

Ch. André Psycho de la peur

Bruno


Precht


Billeter

Rencontres


Ch André


Savoir attendre

Gilligan

EKR

Cyrulnik-Morin


Dejours light
Cyrulnik light
Talaouit
41yAu4IM-BL. SL500 AA300
MFH

Daewoo

 


La phrase du moment

Rien n'est plus pratique qu'une bonne théorie - Kurt Lewin.

 

Patrick Lamarque

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